Le besoin de maison nationale par B. Pascaud
Le combat des idées a besoin d'un réarmement continuel. D'où qu'il vienne, il est le bienvenu. C'est pourquoi il faut saluer Régis Debray pour la publication de sa conférence prononcée au printemps dernier à Tokyo. Elle est intitulée Eloge des frontières*. Après avoir pensé que cette l'affirmation rendait le livre irrecevable en France, l'auteur tente tout de même d'être prophète en son pays. Cet ouvrage constitue un pavé, certe pas par son épaisseur (il ne compte pas cent pages), mais par le poids de son irrespectueux argumentaire dans la mare de la bien pensante mondialiste et citoyenne. Curieusement, (mais cela durera-t-il ?), au moment où s'écrivent ces lignes, les premières réactions sont plutôt positives.
Pourtant l'auteur n'y va pas de main morte contre " l'intelligentsia post-nationale " :
"Une idée bête enchante l'Occident: l'humanité, qui va mal, ira mieux sans frontières... Ainsi tout ce qui a pignon sur rue dans notre petit cap de l'Asie - reporters, médecins, footballeurs, banquiers, clowns, coaches, avocats d'affaires et vétérinaires - arbore-t-il l'étiquette "sans frontières".
Et de poser la question :
" Et si le sans-frontiérisme était un leurre, une fuite, une lâcheté ? Partout sur la mappemonde, et contre toute attente, se creusent ou renaissent de nouvelles et d'antiques frontières. Telle est la réalité. En bon Européen, je choisis de célébrer ce que d'autres déplorent : la fron-tière comme vaccin contre l'épidémie des murs, remède à l'indifférence et sauvegarde du vivant."
Publié par beaucoup d'autres, le livre aurait été l'objet d'un complot du silence. Avec Régis Debray il devient un vecteur d'audience médiatique. On en parle sur les ondes, à la télévision, dans les "grands" journaux natio-naux… Ainsi tourne le système ! Tant mieux en la circonstance puisque cela vaut d'entendre, ou de lire, des vérités à contre-courant.
"La nation est une communauté de souvenirs et d'espérance"
"La guerre, c'est l'absence de frontières" (entendez de bonnes frontières).
" Là où il n'y a pas de frontières, on élève des murs".
"La mondialisation provoque la balkanisation". "Qu'est-ce que le sans-frontiérisme ? Un économisme", qui "déguise une multinationale en une fraternité", "avalise le moins d'Etat en masquant son corollaire : un plus de mafia".
"Ceux qui "se croient partout chez eux" sont "des hommes dangereux".